L’exception culturelle n’est pas qu’un concept en droit international et en politique culturelle pour des traités internationaux, elle est faite aussi de ce qu’en font les citoyens.
Dans l’éloge de la société de consommation, le philosophe Raymond Ruyer nous donne son point de vue en 1969 :
« Une culture établie, protégée, subventionnée, constituée en église ou chapelle vivant aux dépens du public risque fort de n’être qu’une fausse culture. (…) La vraie culture, le vrai sport, l’art véritable comme la vraie religion, est plus réellement démocratique. Elle est plus réellement et plus spontanément demandée. Elle ne va pas de haut en bas, jusqu’au peuple, à partir de mystérieux arcanes habités par des grands prêtres ».
Aussi, en nous proposant une musique à toucher, à lire, à jouer, à déplier, et mise en scène en image, Gilles Duhaut, archetier, participe à l’exception culturelle Française contemporaine.
Il appartient à chaque citoyen, à chaque collectivité, à chaque conseil scientifique lié au confinement, à chaque élu de la république, à chaque artiste, à chaque entrepreneur, à chaque artisan, d’inventer le patrimoine du futur, plutôt que de subir l’écroulement du patrimoine du passé et de participer alors, à l’exception culturelle d’une Nation.
Pierre-Marie PEM Braye-Weppe et Arnaud NANO Méthivier, curateurs du Festival des Arts Confinés. (Antoine Méthivier, directeur de l’espace culturel Agora Off)
S’inventer autre par Gilles Duhaut
Dans le profond de nos mémoires, il y a un pays,
Dans l’aube bleue de ce pays, on voit …
On voit des êtres vivants qui courent à leur destin
Des êtres qui brandissent des bâtons, des drapeaux…
A ne pas voir comme ils seront…demain
Dans la rosée matinale, on voit …
On voit des femmes courbées sur leurs peines,
Aujourd’hui, hésitantes, demain, comment ? …
Des efforts étranglés à cette obscurité d’indifférence
Bien au delà de leurs charges on peut voir un horizon d’espoir
Les gestes répétés, les gestes insensés,
Dans le profond de nos mémoires
Les gestes non questionnés, jamais démasqués, encore moins dénudés
S’effacent les désirs par les clichés du quotidien
A force de se répéter, par des mots rabâchés
Poudre aux yeux, mélanges indifférents, grisaille de l’uni,
De quoi gommer les peurs avec la manière de placer chacun
Ou bien gars ou bien fille, homme ici…femme là…
On a toujours cru,… faire homme, faire femme…Humain?
Désirs ou rêves simples, faut voir aux mémoires à venir
Où verra-t-on enfin grandir le désir d’être, sans l’étiquette,
Solitude voulue, coude à coude choisi, pénombre des mémoires.
Inverser c’est trop simple, certitudes à balayer,
Au moins regarder le mouvement de chacun ou chacune innovant,
Contredire ce qui ne se dit pas à force de se répéter !
Au delà des mémoires Faudra se regarder, s’étonner…
Faudra s’émerveiller, se surprendre stupéfait, bouche bée,
N’en pas croire ses yeux, accueillir l’inédit, en trembler,
S’éblouir et savoir s’y inscrire
Accepter, fêter l’inattendu.…ça je ne l’aurais jamais cru…
Ton regard étonné d’un qui ne savait pas,
D’une qui ignorait ce reflet merveilleux tout au bord de leur manque,
Faudra pas s’étonner si ce n’est pas facile
Raconter les mémoires et dire l’aujourd’hui
Débusquer le demain qui s’extrait des ornières
Tout simplement dire non, contredire ce qui ne se dit pas à force de se répéter
Comme l’idée d’être fait pour ça !
Inventer l’élan, résister pour créer, créer pour résister et puis
Faire rire la vie qui a tant à nous dire
Autre il faut s’inventer, pour s’y retrouver, s’inventer, s’inventer « autre »…
Fragments de la brisure par Gilles Duhaut
La solitude d’un fragment
Indépendance d’une déchirure en recherche d’identité
comme un morceau séparé de sa réalité
Cette part brisée s’est oubliée dans l’ordinaire
des débris de notre quotidien
Dans une démesure explosive et dynamique,
la puissance de l’artiste sublime
les fragments de nos vies ordinaires
construisant l’oeuvre en équilibre précaire de ce qui reste de la totalité
ou l’essentiel s’est perdu
Éloge du fragment
inscrit dans cette continuité du temps
ficelés dans nos habitudes inconscientes »
« …Et pour finir quelques mots sur la sensation perdue de création dans les contraintes non souhaitées, d’un confinement:
Après une grande inquiétude au tout début du confinement, un sentiment de mal-être et un premier état d’enfermement s’installe. A l’atelier avec deux compagnons, pas de solitude au sens propre du terme, mais un isolement perturbe le cheminement de la création. Habituellement le geste de l’outil est guidé par l’idée que l’archet qui prend forme trouve son existence en résonance dans les mains du musicien. Tout comme l’empreinte de l’artisan sur les manches d’outils, par la création d’un archet, mes mains me donnent la parole.
Tout à coup, ou plus exactement de manière insidieuse, cette histoire tend à se briser. Les partages et les contacts sont distanciés. Alors pour retrouver de la réalité et s’arracher à cette pesanteur, l’idée qui fait son chemin, s’installe, de « faire » autre chose en passant par l’écrit ou la réalisation d’un livre objet, pour se procurer un peu de satisfaction à ces contraintes. »
Gilles Duhaut, archetier
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