L’hospitalité de la folie / échange semaine 4

Nous continuons dans une discussion sans fin. Nous finissons une discussion en continue.

Françoise m’écrit dans une pulsion de générosité sans me dire pourquoi.

Je prends le temps pour comprendre avant de le partager.

 

Pense-bête n°1

Tentation de Saint-Antoine, fragment, Jérôme Bosch

 

Entonner les paroles en entonnoir
Thiéfaine – Goya

 

Les Dingues et les Paumés

Hubert-Félix Thiéfaine

Les dingues et les paumés jouent avec leurs manies

Dans leurs chambres blindées, leurs fleurs sont carnivores

Et quand leurs monstres crient trop près de la sortie
Ils accouchent des scorpions et pleurent des mandragores

Et leurs aéroports se transforment en bunkers

À quatre heures du matin derrière un téléphone

Quand leurs voix qui s’appellent se changent en revolvers

Et s’invitent à calter en se gueulant come on

Les dingues et les paumés se cherchent sous la pluie

Et se font boire le sang de leurs visions perdues

Et dans leurs yeux-mescal masquant leur nostalgie

Ils voient se dérouler la fin d’une inconnue

Ils voient des rois-fantômes sur des flippers en ruine

Crachant l’amour-folie de leurs nuits-métropoles.

Ils croient voir venir Dieu ils relisent Hölderlin

Et retombent dans leurs bras glacés de baby-doll

Les dingues et les paumés se trainent chez les Borgia

Suivis d’un vieil écho jouant du rock ‘n’ roll

Puis s’enfoncent comme des rats dans leurs banlieues by night

Essayant d’accrocher un regard à leur khôl

Et lorsque leurs tumbas jouent à guichet fermé

Ils tournent dans un cachot avec la gueule en moins

Et sont comme les joueurs courant décapités

Ramasser leurs jetons chez les dealers du coin

Les dingues et les paumés s’arrachent leur placenta

Et se greffent un pavé à la place du cerveau

Puis s’offrent des mygales au bout d’un bazooka

En se faisant danser jusqu’au dernier mambo

Ce sont des loups frileux au bras d’une autre mort

Piétinant dans la boue les dernières fleurs du mal

Ils ont cru s’enivrer des chants de Maldoror

Et maintenant, ils s’écroulent dans leur ombre animale

Les dingues et les paumés sacrifient Don Quichotte

Sur l’autel enfumé de leurs fibres nerveuses

Puis ils disent à leur reine en riant du boycott

La solitude n’est plus une maladie honteuse

Reprends tes walkyries pour tes valseurs maso

Mon cheval écorché m’appelle au fond d’un bar

Et cet ange qui me gueule : viens chez moi, mon salaud

M’invite à faire danser l’aiguille de mon radar

 

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