Résidistance DVDV/EDCEE # 7

Tout appartient au travail en cours

Prendre ses marques

1) Confiné – esprit des confins le 28/03/2020

Magnifique festival que celui des Arts Confinés. Je voudrais faire part, en tant que plasticien, de mon expérience. Sous forme de EDCEE : Expérience de confinement en extérieur. Je suis dehors, j’ai la tête dans les arbres, l’esprit connecté, le psychisme désamorcé, je ne croise personne, je deviens personne.

Je ramasse un tronc débité, délaissé, je le reconstruis puis je l’évide.

Un surplus d’énergie, plus de masse, une spirale à l’intérieur du tronc segmenté et évidé qui parle de la croissance de l’arbre et qui en même temps absorbe la lumière du soleil en une autre spirale inversée. Deux spirales valent mieux qu’une. Je suis seul. Seul au monde et ce n’est plus de la solitude mais une connivence et une adhésion avec tout ce que formule le vivant.

A supposer que je sois seul sur terre, en tant que premier ou dernier homme, je sais que je ferai exactement ce que je fais aujourd’hui, en cette période de réclusion. Je continuerai de sculpter comme je le fais depuis toujours. Pour moi, être confiné c’est habiter les confins.

2) Bob le 29/03/2020

Il faut que je parle du mouton, Bob. Confiné, je fais ce pour quoi je suis fait, produire des œuvres. Bob est venu ici vendredi dernier et il n’a plus quitté les lieux. Il a tout de l’animal de compagnie. Il me suit partout où je vais. Le platane est un bois dur à sculpter. Le dos courbé, je sculpte, je creuse.

Il fait chaud, Bob roupille délicatement. Je pars me chercher de l’eau fraîche. Je bois beaucoup d’eau. Bob bêle, genre ne m’abandonne pas. Je lui dis ne t’inquiète pas, je reviens de suite. Je travaille le tronc sur une terrasse en terre qui surplombe un chemin. Parfois Bob a un besoin fou de se frotter aux tables, aux murs, aux troncs. Quelque chose doit le gratter. Quand je reviens avec ma bouteille en verre que je viens de remplir pour la énième fois d’eau fraîche, je vois le morceau de tronc sur lequel je travaillais, la base sur le chemin, le sommet dépassant sur la terrasse et Bob qui me regarde malicieusement. Il avait bousculé mon tronc pour me montrer quelque chose. Et le tronc dans cette position était plus simple, plus confortable à creuser. Je lui ai dit : Ok merci. Merci beaucoup Bob. Et j’ai continué à creuser.

3) Pleuvoir Le 30/03/2020

Il pleut tout doux. Le paysage est en accord avec la douceur de la pluie. J’ai envie là maintenant de vivre dans une goutte de pluie. J’en aborde une. Je l’apprivoise. Je traverse la paroi. Ça y est j’y suis. J’y reste.

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